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L'Oiseau Bleu

L'Oiseau Bleu de Xavier Gil aux Éditions Ligne Continue

de Xavier Gil

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Livre 17€   -   eBook 4,99€

Matéo vient d’avoir treize ans. Il appartient à la classe de quatrième B du collège Paul Verlaine. Il mène la vie normale d’un collégien de son âge, partageant son temps entre sa famille, ses copains et ses animaux. Pourtant, rien de ce qui va lui arriver n’est vraiment normal. Il découvre petit à petit, et son entourage avec lui, qu’il possède d’étranges pouvoirs. Ceux-ci apparaissent sous forme de signes : rêves et visions, maladies répétées, attitudes et phénomènes étranges, qui viendront s’accumuler jusqu’à une révélation brutale. Il lit dans l’esprit des gens, il parle aux animaux, il voyage par la pensée dans l’espace et le temps, il peut deviner le futur et sonder le passé, il peut guérir par la force de son esprit et, bien plus inquiétant, il peut parler avec les morts. D’où lui viennent ces pouvoirs et cette force qui prennent possession de lui ? Pourquoi lui ? Quel est ce vieil homme qui lui apparaît en songe ? Quelle est cette contrée étrange et démesurée qu’il traverse en rêve ? Que signifient ces appels qu’il ressent au fond de lui-même ? Qu’attend-on de lui ?

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Photographie du voyage ayant inspiré le roman L'Oiseau Bleu de Xavier Gil

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L’homme savait que le moment était venu. Une grande fatigue envahissait son corps malade. Il était prêt à faire le grand voyage. Avant, il avait encore une dernière mission à mener à bien. Une mission très importante. Peut-être la plus importante, la plus difficile aussi. Il savait où il devait se rendre. La veille au soir, il avait rassemblé quelques affaires dans un sac qui attendait posé à même le sol, près de la porte. Le minimum car la route était longue. Ensuite, il s’était étendu tout habillé sur sa couche, laissant son esprit vagabonder tandis que son corps sec et noueux prenait du repos. Ses membres immobiles lui faisaient mal. Son âme, elle, voletait librement comme un grand oiseau bleu cobalt dans l’éther de la nuit. À l’aube, il se leva, prit son sac en bandoulière et, sans se retourner, quitta le village. Il prit le chemin forestier le long de la rivière et disparut rapidement dans la brume du petit matin…

Matéo poussa le coude d’Émilie, sa voisine. Il lui rendit le feutre qu’elle venait de lui prêter quelques secondes auparavant et lui glissa un petit bout de papier sur lequel il avait griffonné à la hâte cette question : « As-tu un autre bleu ? Plus violet ? » Il cherchait une couleur spéciale. Il considéra avec convoitise la trousse pansue de sa camarade de classe, posée soigneusement devant elle, à portée de main. Il hésita à s’en emparer de force. Seules les filles possédaient ce type de stylos qu’elles appelaient entre elles « les beaux stylos ou les stylos magiques » Des stylos-billes aux couleurs originales : vert pomme, rose fluo, aune canari, bleus de toutes les nuances. Certains possédaient une encre aux teintes pastel, d’autres un effet pailleté. Certains même possédaient une encre odorante : cerise, banane, cannelle, chewing-gum, pop-corn. Les flancs rebondis de cette trousse devaient contenir l’objet convoité. Il en était persuadé et, pour finir son dessin, il avait besoin d’un bleu, mais pas n’importe quel bleu. Un bleu particulier, tirant sur le violet.
Attentive au cours, la jeune fille faisait mine de l’ignorer. Pour attirer son attention, il lui tapota le bras à plusieurs reprises et poussa avec insistance le bout de papier vers elle. Exaspérée, elle finit par répondre aux injonctions de son voisin. Elle fouilla sa trousse avec agacement, s’empara d’un feutre et le lui lança sans même daigner tourner la tête. Matéo considéra le bouchon de manière circonspecte. Il l’ôta et se mit à colorier la feuille posée devant lui. « Oui, ça pourrait bien être cette couleur » Il jeta un regard furtif par la fenêtre pour essayer d’apercevoir à nouveau l’oiseau qu’il essayait de reproduire sur la feuille quadrillée. Quelques minutes auparavant, cet oiseau voletait encore dans la frondaison des grands marronniers, au loin, de l’autre coté de la cour, face au collège.
C’était ridicule, il le savait bien. Il avait néanmoins le sentiment que l’oiseau le suivait depuis plusieurs jours, volant d’arbre en arbre. Un oiseau aux formes bizarres qu’il ne connaissait pas. Le volatile lui paraissait de grande taille, mais plus que sa stature, ce qui l’avait frappé était sa couleur. Un bleu étrange. À la fois éclatant et soutenu. Un bleu violet. Quelque chose le poussait à terminer son dessin.
Ignorant le flot de paroles monocorde de Mademoiselle Boileau, professeur de français de la classe de 4ème B du collège Paul Verlaine, Matéo s’appliqua à colorier le plumage de l’oiseau qu’il avait dessiné à grands traits, campé sur une haute branche, au milieu du feuillage. Feutre entre les lèvres, il se recula de quelques centimètres pour considérer son œuvre. Satisfait du résultat, il se pencha à nouveau sur sa feuille, tirant la langue sans s’en apercevoir, tant était grande sa concentration. Tout à son projet, il ne prit conscience du silence de la classe que lorsque la silhouette menaçante de Mademoiselle Boileau se dressa devant son bureau. Bras croisés, tête penchée, lèvres serrées, Mademoiselle Boileau attendait. Quand il leva les yeux vers elle, elle lâcha mi-sévère, mi-moqueuse : « Tiens, tiens, tiens ! Et que fait là notre Matéo ? » Bien que pris en flagrant délit, Matéo essaya en se penchant en avant, de cacher son dessin aux yeux de sa professeur. Il bredouilla : « Euh ! Rien » « Comment, rien ! » s’exclama-t-elle, « Et ça, Monsieur Verdier ? C’est quoi ça, au juste ? C’est rien ? »
Mademoiselle Boileau s’était emparée de la feuille de papier que Matéo avait essayé avec maladresse de dissimuler sous son avant-bras et, tout en la pinçant entre ses doigts, la brandissait à la hauteur des yeux du coupable avec un sourire victorieux. Dans son dos, la classe entière fut soulevée d’une houle de rires.
Mal à l’aise, Matéo gigota sur sa chaise. Il chercha des yeux une aide, un soutien, mais même ses copains le regardaient en rigolant. Il sentit que la partie était perdue. Il courba l’échine et essaya de rassembler ses esprits. Le regard pesant et inquisiteur de Mademoiselle Boileau, l’empêchait de réfléchir et de décider d’une conduite à suivre. Il resta muet, la bouche sèche, le cerveau vide, aucun son ne semblant vouloir sortir de sa gorge serrée. Au bout de quelques pénibles secondes, il articula avec difficulté les seuls mots qui lui vinrent à l’esprit : « Ben, Oui, c’est… rien ! » Ces mots lui furent fatals. Le sourire de Mademoiselle Boileau se figea en un rictus cruel. Ses yeux se mirent à lancer des éclairs venimeux. Des mots jaillirent de sa bouche comme des piquants : « Pendant le cours de dessin, je ne sais pas ce que fait Monsieur Verdier : peut-être du français, car pendant le cours de français, Monsieur Verdier, là, fait du dessin » Elle agita l’œuvre du fautif devant la classe hilare. « Ça se gâte » songea Matéo. Il déglutit avec difficulté et, se tassa sur sa chaise. Tournant son regard vers la fenêtre, il tenta une explication d’un geste vague et désabusé de la main : « C’est l’oiseau, là… »
Mademoiselle Boileau aurait pu à cet instant faire preuve de clémence mais elle prit cette réponse et le sourire ingénu qui l’accompagnait, pour de l’impudence. Les rires de la classe se brisant en vagues contre son dos l’encouragèrent à se montrer impitoyable vis-à-vis de l’élève insolent qui lui faisait face : « Quel beau dessin ! Quel merveilleux oiseau dans son arbre ! Quel artiste nous avons là ! » La classe, écroulée de rire, la poussa à porter l’estocade. « Donnez-moi votre carnet de liaison ! Vous aurez un mot à faire signer par vos parents. Vous viendrez le récupérer à la fin du cours » Le cœur de Matéo se mit à battre la chamade. « Mince, pas encore un mot ! Ça va être ma fête à la maison ! » Comment vais-je faire pour me sortir de ce mauvais pas ? La fin du cours fut abominable. Émilie, lui jetait des regards entendus, en tenant sa trousse à bonne distance ; ses amis lui lançaient des coups d’œil moqueurs. La sonnerie mit fin à son calvaire mais l’épreuve la plus importante l’attendait encore.
Il attendit que la classe se vide avant de se présenter devant son professeur. Cette dernière ne leva les yeux vers lui qu’après avoir rédigé, d’une écriture froide et implacable, le mot tant redouté. Elle plia le dessin, preuve inachevée du méfait, et le glissa dans le carnet qu’elle lui tendit d’un geste brutal. Elle s’adressa à lui d’un air sévère : « Tu bavardes. Quand tu ne bavardes pas, tu rêvasses. Et, quand tu ne rêvasses pas, tu dessines. Tes résultats s’en ressentent. Ils sont en chute libre ce trimestre. Pourtant nous ne sommes que début mai et l’année est loin d’être terminée. Il faut que tu réagisses et que tu te reprennes. J’espère que cet avertissement te servira de leçon. La prochaine fois, tu seras collé » Penaud, Matéo, marmonna de vagues promesses en rangeant le carnet dans son sac. Il quitta le collège en traînant les pieds et sur ses frêles épaules, son cartable, semblait peser une tonne.
Il gagna le local à vélos et fut déçu de constater que ses amis ne l’avaient pas attendu. Les derniers collégiens s’égayaient devant le portail de l’établissement. Il sortit sa clé de cadenas, s’agenouilla près de la roue avant, défit la chaîne, la lova sous la selle avec soin puis enfourcha son VTT flambant neuf, offert quelques jours auparavant, pour ses treize ans. Maudissant Mademoiselle Boileau et les affres de la vie scolaire, il se mit à pédaler avec résignation sur le chemin du retour. C’était une belle après-midi de printemps et le soleil encore vif donnait envie de musarder le long des pistes cyclables et des chemins forestiers plutôt que d’aller s’enfermer entre les quatre murs de sa chambre. Il consulta sa montre. Le cadran luminescent lui annonça qu’il n’était pas loin de cinq heures. Mieux valait rentrer à la maison et gérer la situation qui s’annonçait critique. Pendant le trajet, il ne put s’empêcher de laisser errer son regard sur la cime des arbres pour y chercher une bulle de couleur bleue. Depuis quelques jours, il n’arrivait pas à détacher son attention de cet oiseau qui hantait irrésistiblement son esprit. Il sentait comme une angoisse sourde étreindre sa poitrine. Une appréhension mêlée de curiosité et d’une certaine fascination. D’où venait cet oiseau ? De quelle espèce était-il ? Pourquoi avait-il l’impression d’être suivi et épié par l’animal ? Il pédalait vigoureusement dans la pente du cimetière quand son cœur tressaillit. Il aperçut au loin, non pas la robe bleue de l’oiseau mystérieux mais la jupe colorée de Lola. Il s’assura que personne de sa classe et surtout qu’aucun de ses copains ne soit aux alentours, avant de forcer la cadence pour rattraper la jeune fille.
Le cœur battant, il la rejoignit devant les grilles du cimetière :
« Salut, Lola !
- Bonjour Matéo !
- Ça va ?
- Ça va, et toi ?
- Plus ou moins. Je viens d’écoper d’un mot en Français. C’est Mademoiselle Boileau. Hyper sévère ! Tu verras quand tu seras en quatrième.
- Qu’est-ce que tu as fait pour avoir un mot ? »
Matéo préféra éluder la question et marmonna une vague explication avant de s’enquérir d’un ton protecteur, des nouvelles de la classe de 6ème A. Elle lui narra quelques anecdotes avec certains des professeurs qu’il avait eus les années précédentes. Il l’écouta avec ravissement, fasciné par le mouvement délicat de ses lèvres roses, la blancheur de sa peau, la blondeur de ses boucles. En retour, il lui raconta quelques-uns de ses faits d’arme, avec ces mêmes professeurs. Il en rajouta un peu, pour assurer son effet. Lola n’était pas dupe mais elle rit de bon cœur. Tandis qu’elle riait, Matéo put discerner, au fond de ses grands yeux clairs, une ombre de tristesse. Voilà six mois déjà que Lucas, le grand frère de Lola était mort. Un accident de scooter. Un accident bête. Mais pour Lola, cet accident c’était encore hier. Une blessure ouverte qui saignait toujours. Matéo le savait car Lola s’était souvent confiée à lui. Il savait qu’elle allait tous les jours se recueillir sur sa tombe :
« Ça va, vraiment ?
- Oui, oui vraiment.
- Tu viens du cimetière ?
- Oui, je suis allée sur sa tombe un moment.
- Gêné, Matéo ne sut quoi répondre et resta un moment sans rien dire.
- Tu veux que je t’accompagne jusque chez toi ?
- Oui, si tu veux bien. C’est gentil !
- Ils se mirent à pédaler à l’unisson en direction de la maison de Lola, à deux pas de celle de Matéo.
- Alors tu ne veux pas me dire pourquoi tu as reçu un mot ? »
Matéo sourit malgré lui. Avec Lola c’était différent. Il pouvait tout lui dire. Elle-même lui avait déjà dit des secrets, des secrets intimes. Comme par exemple, son deuxième prénom. Peu de personnes savaient que Lola s’appelait en fait, Lola Venise. Oui, Lola comme Lola et Venise comme Venise, la ville. Car, lui avait-elle avoué avec emphase, c’est dans cette ville, que mes parents adorent, que j’ai été conçue. Face à ce secret merveilleux, et d’autres encore, il avait bien été obligé lui aussi d’ouvrir quelques jardins personnels. C’est ainsi qu’il lui avait confié certains secrets. Ces secrets étaient comme des gages qu’ils s’échangeaient. Ils avaient ainsi scellé leur amitié. Matéo lui expliqua donc pourquoi il avait été puni. Il lui parla de l’oiseau bleu. Elle l’écouta avec attention. Il s’embrouilla un peu dans ses explications ce qui lui valut quelques remarques taquines de la part de la fillette.
Après avoir laissé Lola devant chez elle, Matéo se hâta pour rentrer chez lui. Arrivé devant la grande maison familiale, il descendit de son vélo et jeta un coup d’œil par-dessus le portail en chêne. Pas de voitures. Normal. Il était encore tôt. Ni ses parents, ni son frère ni sa sœur n’étaient encore rentrés. Sortant du collège à seize heures trente, il était normalement le premier à arriver à la maison vers les cinq heures, cinq heures et quart selon qu’il prenait le bus ou qu’il rentrait à pied ou en vélo. Justine, sa grande sœur ne revenait du lycée qu’une bonne heure après lui, suivie de près par son frère, Hugo. Leur mère quant à elle, ne revenait pas de la bibliothèque municipale où elle travaillait avant dix-huit heures trente. Leur père, quittait rarement son bureau avant dix-neuf heures trente, et arrivait donc en dernier peu avant huit heures. Pour l’instant, il était donc tranquille. En fait, même quand son frère et sa sœur étaient à la maison, Matéo était assez tranquille. Justine, dix-sept ans, préparait le bac en classe de terminale. Hugo, dix-neuf ans, était en Maths Sup. Dès leur retour à la maison, les deux grands s’enfermaient dans leurs chambres respectives pour travailler. Ils n’en sortaient que pour s’alimenter et pour se livrer à quelques rares activités.
Deux fois dans la semaine, Justine rejoignait sa troupe de cirque et Hugo partait s’entraîner dans son club de natation. Ils réintégraient ensuite au plus vite leurs chambres transformées en cavernes studieuses, d’où Matéo était totalement interdit de séjour. Des aboiements accompagnèrent Matéo tandis qu’il faisait le tour de la maison et rangeait son vélo dans le garage. Quand il ouvrit la porte intérieure du garage donnant directement dans la cuisine, il libéra une boule de poils blanche, montée sur ressorts, qui l’accueillit avec une joie démonstrative. Le chien, qui tortillait du derrière dans tous les sens, finit par se caler contre la jambe de son petit maître, l’invitant du regard à lui faire des caresses. Matéo enfonça ses doigts dans le pelage doux et cotonneux. Sans même poser son sac, il s’engagea dans une longue séance de grattouilles. « Comment vas-tu Ramsès, comment vas-tu mon chien ? » Quand il se redressa, le dénommé Ramsès, un petit coton mâle de deux ans, lui quémanda à nouveau des caresses en posant ses deux pattes avant sur la cuisse. Il gémissait tout en battant l’air de sa queue en panache. Matéo sortit dans le jardin et joua un long moment avec lui avant de passer à nouveau dans la cuisine pour engouffrer un monstrueux goûter qui lui permettrait d’attendre l’heure du dîner. Après avoir englouti plusieurs tartines de pain beurré avec du chocolat, il regagna sa chambre, Ramsès sur ses talons. La maison des Verdier était une grande bâtisse construite sur deux étages au milieu d’un immense jardin arboré. Les parents avaient établi leurs quartiers au rez-de-chaussée, où étaient les parties communes, laissant l’étage du haut pour leurs enfants. Hugo et Justine possédaient chacun leur chambre, l’une en face de l’autre, dans la partie gauche de la maison. Matéo, pour sa part, avait hérité d’une immense pièce aménagée dans la tour carrée flanquant l’aile droite de la villa. À l’origine, cette pièce était la chambre d’amis car elle disposait d’une salle de bains attenante et bénéficiait d’un accès indépendant. Un escalier extérieur permettait en effet de descendre dans le jardin. La chambre avait ensuite été transformée en salle de jeux avant de lui être attribuée définitivement. C’était une vaste pièce de près de quarante mètres carrés située juste au-dessus du salon. Plus qu’une chambre, c’était tout à la fois, la grotte d’Ali Baba, un repaire de pirates, une base d’agents secrets, un véritable zoo. Sur la porte qui donnait sur le couloir distribuant vers les chambres de son frère et de sa sœur, un écriteau pendu à simple clou donnait le ton : « Prière de ne pas déranger. Propriété privée. Code secret obligatoire ».
Matéo adorait sa chambre. Il disposait d’une salle de bains pour lui tout seul, ce qui lui permettait de pouvoir se doucher ou se baigner pendant des heures sans avoir à subir les foudres du reste de la famille. Il appréciait l’espace qui lui permettait de stocker et conserver toutes sortes d’objet. Il aimait énormément son balcon qui lui permettait d’accéder directement au jardin et à la terrasse. Du haut du balcon, il pouvait embrasser tous les alentours. Il pouvait ainsi surveiller les environs et en particulier, repérer l’arrivée de ses amis. Ainsi le balcon devenait tour à tour : mirador, poste de vigie, tour de gué. Il aimait enfin la luminosité de la pièce. Une large porte-fenêtre donnant sur le balcon orienté plein sud, laissait rentrer en permanence, un flot de lumière. C’était particulièrement agréable avec l’arrivée des beaux jours. Matéo ouvrit son cahier de texte. Anéanti par l’ampleur de la tâche et la folie de ses professeurs, il se contenta de faire rapidement son cartable pour le lendemain, laissant les devoirs pour plus tard. Il laissa sur le coin de son bureau, le carnet de liaison qu’il aurait à faire signer par ses parents. Là aussi, on verrait plus tard. Il préféra faire le tour de ses animaux. Chaque animal représentait un cadeau d’anniversaire. Il se tourna en premier vers Cooky son cochon d’Inde. Il ouvrit sa cage et le prit dans ses mains, le protégeant des assauts de Ramsès. Il l’inspecta, le gratta derrière l’oreille jusqu’à ce que les couinements apeurés du petit animal se transforment en ronronnements de plaisir. Il le plaça sur son épaule où le rongeur resta niché pendant qu’il allumait son ordinateur et consultait sa messagerie électronique. Divers camarades de classe venaient aux nouvelles. « Alors, collé ou pas collé ? » Après avoir répondu de manière tout aussi laconique, il lança des messages à ses copains pour fixer un rendez-vous pour le lendemain matin. « Départ en vélo 7 h 30 devant les grilles du cimetière » Il remit Cooky dans sa cage et tourna son attention vers Pistache, sa perruche. Après s’être assuré que la fenêtre était bien fermée, il ouvrit la porte de sa cage et laissa l’oiseau s’envoler dans la pièce. Pistache se réfugia sur son perchoir, en réalité un vieux portemanteau sur pied trouvé au grenier. C’était une petite perruche ondulée d’Australie, à la silhouette gracile dans sa livrée jaune et verte. Il inspecta la cage posée sur une table près du radiateur. C’était une large cage en fil de fer, aux barreaux étroits, fermée sur deux côtés par une fine planche de bois pour préserver l’intimité de l’animal. Pendant que l’oiseau voletait dans la chambre, il changea l’eau de l’abreuvoir en porcelaine et du petit bac de plastic servant de baignoire.
Il nettoya également le bac de sable fin dans lequel l’oiseau se séchait après son bain. Il plaça des graines dans la mangeoire. Si le chien et le cochon d’Inde n’étaient pas les meilleurs amis du monde, le chien et la perruche faisaient malgré tout bon ménage. Les seuls vrais moments de tension intervenaient quand la perruche se perchait sur le bord de la gamelle de Ramsès. Le chien grognait alors pour montrer son mécontentement. Elle pouvait cependant impunément grimper sur son corps ou se planter sur sa tête.
Le chien la laissait faire. Au pire, s’ébrouait-il, comme un chien mouillé, occasionnant l’envol de la délicate perruche, à peine effarouchée.
Il était en pleine conversation avec Pistache quand la porte du bas claqua : Hugo ou Justine venait d’arriver. Il pensa avec appréhension que dans peu de temps ses parents rentreraient. Il aurait alors la difficile tâche de leur faire signer le mot. Il réintégra la perruche dans sa cage. Tout en lui parlant à haute voix, il pulvérisa de l’eau sur son plumage. Il se rappelait ce que le vendeur lui avait dit : « Si tu lui dis chaque jour quelques mots simples pendant une vingtaine de minutes environ, tu devrais pouvoir lui apprendre à parler. Il faut qu’elle soit concentrée. Parle-lui plutôt le soir, pendant que tu prends soin d’elle ou avant qu’elle s’endorme » Il appliquait donc les recommandations du vendeur à la lettre. Pour l’instant sans succès. Les perruches possédaient une grande longévité. Elles pouvaient vivre vingt années. Il avait donc le temps et prenait son mal en patience. Il pensa à nouveau à l’oiseau bleu. Pourrait-il un jour le voir de près et lui parler comme il le faisait maintenant avec sa perruche ? Il l’observa s’installer sur sa balançoire pour la nuit. Pistache était une couche-tôt. Il recouvrit la cage d’un tissu léger et lui souhaita bonsoir. Il passa dire bonjour à Léon son poisson rouge qui, dans son bocal, faisait inlassablement des cercles autour d’une épave en plastic sur laquelle on voyait un pirate tendre un sabre d’abordage. Il lui donna une pincée de vers. Il n’eut pas le temps de descendre saluer Charlotte sa tortue, les pneus d’une voiture grincèrent sur le gravier. Maman rentrait à la maison. Il allait falloir jouer serré.

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